Viollet-le-Duc

La plume autorisée d’un de nos collaborateurs spéciaux analysera prochainement, avec tous les développements qu’elle comporte, l’intéressante et puissante figure de Viollet-le-Duc. Nous ne devons pas cependant attendre jusque-là pour signaler l’exposition de l’œuvre de l’éminent architecte, ouverte depuis quelques jours au musée de Cluny. Cette exposition a été une véritable révélation pour bien des gens, qui ne connaissaient du maître regretté que ses beaux travaux de Notre-Dame, du château de Pierrefonds, et ses admirables Dictionnaires de l’Architecture et du Mobilier. Plus d’un visiteur a dû se demander, en présence de cette énorme collection de dessins, de croquis, d’aquarelles, comment une seule existence d’homme avait pu suffire à l’exécution des innombrables travaux dont ces documents ne sont, en somme, que l’indication sommaire. Reconstructions de monuments antiques étudiées et rendues avec une étonnante faculté d’évocation, savantes restaurations de cathédrales ou de villes du moyen âge ; à côté de cela, simples souvenirs de voyage, études de paysage enlevées avec une vigueur et une vérité saisissantes, tantôt dans la forêt de Compiègne, tantôt sur les sommets du mont Blanc ; on ne sait ce qu’on doit le plus admirer dans cette collection, dont le catalogue ne contient guère moins do 700 numéros, et qui remplit une salle immense, trop petite encore. N’oublions pas les émouvantes aquarelles du siège de Paris, jetées au vol sur le papier, à cent mètres de l’ennemi, entre une reconnaissance et une nuit de grand’garde. Le choix du palais de Cluny a été particulièrement heureux en cette circonstance : l’œuvre de Viollet-le-Duc semble, en eftet, avoir trouvé son cadre naturel dans ce merveilleux musée d’art et d’archéologie, où tout notre passé revit dans l’intimité de ses mœurs et dans l’éclat de son luxe.