Gaule.com
Gaule.com

A l’affiche au théâtre

Vendredi 15 octobre 1880 ♦ Actualité

La série des premières représentations a commencé avec l’inauguration du Gymnase restauré. La direction nouvelle de M. Koning a tenu à faire défiler son personnel dans Nina la Tueuse, qui a donné tout ce que l’on est en droit de demander à une pièce de ce genre : de l’esprit et des épisodes heureusement trouvés. La critique qu’on en peut faire, c’est qu’elle eût gagné encore à être écrite en simple prose. Le vers, choisi nous ne savons trop pourquoi parles auteurs de cet à-propos, les a nécessairement mis à la gêne. Il faut constater, en même temps, Je succès obtenu par la Papillonne de M. Sardou qui, transportée dans un cadre et dans un milieu mieux appropriés, prend une brillante revanche de l’échec subi lors de sa première apparition au Théâtre-Français.

Le titre de l’Arbre de Noël avait fait concevoir, pour la nouvelle féerie de la Porte-Saint-Martin, des espérances qui ne se sont pas réalisées. Avec de splendides décors et d’ingénieux agencements, on a servi au public la vieille histoire du talisman égaré, revenant après toutes sortes de péripéties invraisemblables aux mains de son légitime propriétaire, pour nous montrer le vice puni et la vertu récompensée. Les auteurs, laissant faire peintres, machinistes et costumiers, ont cru inutile de se mettre eu frais de dialogue.

Au Vaudeville, les Grands Enfants, de M. Gondinet, ont obtenu le succès d’esprit et d’habileté scénique dont l’auteur est coutumier ; la direction et les acteurs y ont contribué par Je soin de l’ensemble et des détails qui distingue la scène de la Chaussée-d’Antin. Mais on se tromperait en cherchant là autre chose qu’une sémillante comédie bien jouée. Aucune démonstration n’en ressort, malgré ce qui avait été annoncé, au point de vue des bienfaits ou des inconvénients du divorce. Une divorceuse, donnée pour pendant à une femme passagèrement séparée de son mari, et que le sentiment maternel finit par réconcilier avec lui, ne peut en effet rien prouver. C’est la séparation légale avec ses conséquences, avec son caractère légal et permanent, qu’il s’agit de mettre en présence de l’annulation complète du lien conjugal, si l’on veut que le public porte un jugement et prenne parti dans un sens ou dans l’autre.

L’affiche des Folies-Dramatiques a remplacé la Fille du Tambour-Major par le Beau Nicolas ; mais la musique de M. Lacome ne parait pas destinée à une vogue aussi durable que celle d’Offenbach. Plus correcte qu’entraînante, elle laisse la soirée paraître longue ; et le contraste avec la pièce qui vient de disparaître, après une si longue carrière, contribue à rendre plus sensible ce manque d’animation. Œuvre estimable assurément, mais qui risque de ne pas dépasser le succès d’estime.

Enfin, l’Opéra-Comique adonné deux petits actes séparés qui ont obtenu un succès mérité de grâce légère et sans prétention. L’un, intitulé : M. de Floridor, est de MM. Nuitter et Tréfeu pour les paroles, de M. de Lajarte pour la musique. Le second, dont M. Cahen, d’Anvers, a écrit la partition sur des paroles de Glatigny, a pour titre : le Bois et reproduit avec beaucoup de fraîcheur une page de la mythologie antique.

Une dernière nouvelle de théâtre, qui n’est pas la moins importante et ne sera pas la moins bien venue ; la Moabite, de M. Paul Déroulède, sera peut-être moins écartée qu’on ne le pensait ; la mise en répétition à date prochaine n’est plus regardée comme impossible à la Comédie-Française.

La Nouvelle Revue (Octobre 1880)
Imprimé sur une presse rotative virtuelle à l'imprimerie municipale de Cheynac.